Les 4 principes fondamentaux du GATT expliqués
Prétendre qu’un accord commercial peut bouleverser la planète en quelques articles semble farfelu. Pourtant, le GATT a redessiné les règles du jeu mondial, ligne après ligne, clause après clause. Son héritage façonne encore aujourd’hui la façon dont les États échangent, négocient, se défient ou coopèrent.
Une clause de la nation la plus favorisée interdit de réserver un traitement spécial à certains partenaires commerciaux, sauf exceptions strictement encadrées. L’interdiction de restreindre la quantité de marchandises échangées ne connaît que quelques dérogations, notamment pour des raisons de sécurité ou de protection de la vie humaine. Les tarifs douaniers affichent une transparence imposée, chaque modification devant être notifiée et négociée. La réciprocité guide chaque engagement, contraignant les membres à accorder les mêmes avantages obtenus lors des négociations multilatérales.
Plan de l'article
Pourquoi le GATT a-t-il transformé le commerce international ?
À partir de 1947, le GATT pose les jalons d’un commerce mondial plus ouvert. Vingt-trois pays, pesant les quatre cinquièmes des échanges, s’accordent pour abaisser les barrières tarifaires sans créer de superstructure. La guerre vient à peine de s’achever, l’institution rêvée (l’OIC) échoue, alors on choisit la voie du pragmatisme : des cycles de négociation, appelés rounds, plutôt qu’une organisation centralisée.
Ce traité va vite marquer les esprits. En sept décennies, les droits de douane moyens passent de 40 % à moins de 4 %. Les pays industrialisés profitent d’abord de cette ouverture, mais la dynamique finit par entraîner aussi pays en développement et pays émergents. Les restrictions quantitatives s’effacent, la circulation des biens s’accélère, l’information devient une exigence. La réciprocité, pilier de l’accord, pousse chaque membre à jouer le jeu collectif, sans perdre de vue ses propres intérêts.
Voici quelques marqueurs concrets de ce bouleversement :
- Baisse massive des tarifs douaniers : de 40 % à moins de 4 % en moyenne.
- Extension du champ d’application : des produits manufacturés aux services et à la propriété intellectuelle lors des derniers rounds.
- 123 pays signataires en 1995, preuve de l’attractivité du cadre multilatéral.
Le GATT ne s’est jamais figé. À chaque cycle, de nouveaux enjeux s’invitent à la table. Les zones régionales comme l’Union européenne ou l’ALENA s’articulent, sans opposition de principe, avec ce socle multilatéral. Résultat : le commerce international trouve un terrain de jeu commun, un code partagé, une méthode pour arbitrer les différends et adapter les règles à des contextes mouvants.
Les quatre principes fondamentaux du GATT : décryptage et portée concrète
Si le GATT a tenu, c’est qu’il repose sur quatre repères structurants. D’abord la non-discrimination : aucune faveur octroyée à un partenaire ne peut être refusée aux autres. C’est la fameuse clause de la nation la plus favorisée : toute avancée tarifaire, comme un abaissement de droits de douane pour tel produit venu de Chine, doit profiter à tous les membres. Pas de passe-droits, pas d’accord caché.
Ensuite, le traitement national. Une fois qu’un produit étranger a franchi la frontière, il doit recevoir exactement le même traitement qu’un produit local. Impossible d’imposer une nouvelle taxe ou d’établir une règle discriminatoire pour handicaper la concurrence étrangère. Cette règle ferme la porte à toute discrimination indirecte.
La transparence constitue le troisième pilier. Tous les membres doivent publier, notifier et discuter les mesures qui impactent l’accès au marché. Cette exigence favorise la prévisibilité, limite les surprises réglementaires, rassure investisseurs et opérateurs, et rend l’arbitraire plus difficile à installer.
Enfin, la réciprocité structure le compromis : chaque concession tarifaire appelle une contrepartie. On ne cède pas sans obtenir. Ce principe irrigue tous les rounds de négociation du GATT : chaque pays avance ses intérêts, mais la dynamique collective reste préservée. Des exceptions existent, moralité publique, santé, unions douanières, mais le cœur du système reste solide, universel et adaptable.
Au-delà du GATT : l’OMC et les nouveaux défis du commerce mondial
En 1995, le GATT passe le témoin à une nouvelle institution : l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Le cadre multilatéral gagne soudain en ambition : institution permanente, secrétariat dédié, organe de règlement des différends pour arbitrer les conflits. Avec 164 membres, l’OMC encadre aujourd’hui plus de 98 % des échanges mondiaux.
Le champ s’élargit. Les services, la propriété intellectuelle, les questions agricoles : l’OMC traite désormais des enjeux bien plus vastes que le commerce de marchandises. Les cycles d’Uruguay puis de Doha tentent d’intégrer davantage les pays en développement, même si la fracture Nord-Sud persiste sur certains dossiers sensibles.
Les accords commerciaux régionaux se multiplient, Union européenne, ALENA, et coexistent avec le socle multilatéral. Les différends ne se règlent plus dans l’ombre : l’organe de règlement des différends de l’OMC joue un rôle d’arbitre, qu’il s’agisse de droits de douane, d’accès aux marchés agricoles ou de régulation numérique.
Face à la résurgence du protectionnisme, aux tensions technologiques et aux défis environnementaux, l’OMC doit se réinventer. Le commerce mondial évolue, les équilibres changent, les nouvelles puissances s’affirment et les économies en développement réclament leur part dans la construction des règles. La partie est loin d’être terminée : le GATT a ouvert la voie, l’OMC doit encore écrire la suite.
